Jour 7 : Asco – Castellu di Vergio
Moi qui voulais partir tôt ce matin, c’est raté. Je décolle d’Asco parmi les derniers, ce qui fait que je me tape une montée au ralenti à doubler tout le monde. Déjà qu’en temps normal c’est pas la joie, mais quand en plus des passages techniques imposent des temps d’attente d’une dizaine de minutes, je trépigne. Heureusement, à partir de sous la Bocca Borba j’ai doublé quasiment tout le monde. Il ne reste qu’un randonneur, qui marche à mon allure. Nous terminons la montée ensemble.
La pointe des éboulis marque le point culminant de ma traversée (2600m). J’hésite à faire l’aller-retour au Cinto, mais il a la tête dans les nuages. Je choisis donc de continuer. Après une descente avalée rapidement, je suis au refuge Tighiettu en milieu de matinée. J’y mange un bout en discutant avec le gardien.
J’enchaîne ensuite en direction du refuge Ciuttulu di i Mori. Cette étape est courte, mais j’ai un peu de mal dans la montée finale de la bocca du Foggiale à cause de la chaleur. Au refuge, je demande au gardien s’il a un short en rab (mon aération est cool, mais je n’ai pas envie de me faire arrêter pour attentat à la pudeur). Chance, il en a un ; par contre, le gars semble être un condensé de clichés corses (bougon au possible, pas aimable, fumant à l’intérieur du refuge). En discutant avec d’autres randonneurs plus tard, j’apprends que c’est connu et que beaucoup sautent ce refuge pour l’éviter.
Finalement j’attaque la longue descente vers Castellu di Vergio. Plutôt que de suivre le GR20 je commence par couper tout droit dans la vallée (vu toutes les sentes je ne suis pas le seul à le faire), puis je croise un groupe de chèvre et un troupeau de russes (à moins que ce ne soit l’inverse). Les chèvres sont accompagnés de chiens, donc je contourne le troupeau ; les russes décident qu’ils ne quitteront pas le chemin, donc j’entends les aboiements furieux alors que je continue tranquillement mon chemin.
Au terme d’une longue traversée (sur le GR20, et un mare e monti et le chemin des transhumances, ce qui occasionne un embouteillage du balisage) j’arrive enfin à la petite station de Castellu di Vergio. Le camping est bondé, mais étonnement il reste l’un des meilleurs emplacements, un peu à l’écart sous un arbre (le lendemain matin j’aurais une des seules tentes ne dégoulinant pas sous la condensation). Petit ravitaillement à l’épicerie, repas en compagnie d’un petit groupe puis looooongue douche chaude (oui des fois je prends des douches :p ).
Descente depuis le refuge le refuge de Ciuttulu di i Mori
Jour 8 : Castellu di Vergio – Petra Piana
Je pars relativement tôt du camping, mais encore une fois bien après les premiers marcheurs à lever le camp. Le pire, c’est que la quasi totalité des gens qui part avant moi ne fait qu’une étape par jour, ce qui me fait penser qu’ils ne devraient pas être là. Ils ne sont clairement pas prêt pour le GR20, mais bon, c’est un autre débat sans fin…
Le départ au soleil du matin dans la forêt est plaisant, et j’avale la montée d’un bon pas. Je croise des vaches dans des endroits improbables sous le Capu a u Tozzu, puis je passe le col et redescend vers le lac de Nino. Je prends l’ancien tracé du GR qui reste en fond de vallée, près des pozzis et des chevaux. C’est ensuite une longue traversée vers le refuge de Manganu.
Je ne m’y arrête pas et attaque directement la montée (intense) vers la bocca alle porte. Au niveau du col il y a plusieurs petits groupes allant dans l’autre sens qui se sont arrêtés pour manger. Je me joins à eux et nous faisons plus ou moins tablée commune. Le moment est très sympa (et j’en sors gagnant 😀 ).
La suite de la crête est sympa, avec deux trois passages où il faut mettre les mains. Ils sont faciles, mais je suis toujours étonné de voir ça sur un GR. Il n’usurpe pas sa réputation du GR le plus difficile au monde.
À un moment, je suis tranquillement en train de descendre pleine bourre en regardant mes pieds quand je croise un allemand. Je me décale sur le côté pour le laisser passer, mais pas assez rapidement à son goût. Il me prend violemment à parti et ses bordées de jurons allemano-anglais résonnent de part et d’autres de la vallée. Sa femme est obligé de le calmer. 😐
La suite est un peu longue et fatiguante. Il fait lourd et l’orage se forme, je me dépêche de rejoindre le refuge que j’atteins en milieu d’après-midi. Il y a un héliportage en cours (c’est rapide, on sent que le pilote maîtrise son affaire). L’orage éclate de l’autre côté de la crête, mais j’ai un peu la flemme de repartir, donc je reste dormir là.
Petit détail : ça fait maintenant plusieurs jours que je me balade avec 7€ en poche (tout juste le prix d’un bivouac), que je garde en cas d’urgence. Je n’ai clairement pas prévu assez de liquide, et les personnes venant du sud m’ont dit que Vizzavone ne proposait pas de distributeur. :/
Jour 9 : Petra Piana – Vizzavona
Ce matin j’arrive à me motiver et je pars alors que le soleil se lève. Enfin, le temps de trouver le départ du GR20 depuis le campement… Après avoir un peu tourné inutilement au milieu de toute cette agitation, je m’engage sur le GR que je quitte rapidement pour suivre la crête jusqu’au refuge de l’Onda. Il y a beaucoup de vent ; au début de la crête je vois un truc ressemblant vaguement à une petite tente complètement retournée. Je m’approche pour voir et tâte la toile avec mon baton. Un « Ooooh » vigoureux m’indique que tout va bien pour la personne, qui m’indique qu’elle a passé une nuit agitée… :p
La crête est tranquille, avec quelques passages où il faut mettre les mains. La descente jusqu’au refuge est un peu déprimante car on voit la montée juste en face. Je reprends de l’eau au refuge, où le gardien me demande de voir le ticket du bivouac de la nuit précédente. Pourquoi, je ne sais pas trop… Bon, et forcément je l’ai pas, mais je lui dit que je l’ai jeté et il ne m’embête pas plus, même s’il me dit que je devrais tous les conserver. :rolleyes:
Dans la montée vers le col suivant, je tabasse un peu ; dans la descente suivante, je traine beaucoup. J’arrive à Vizzavone en milieu d’après-midi. Je recroise des personnes rencontrées à petra-piana, qui sont arrivées avant moi, bizarre. Ils me disent qu’ils ont pris une variantes par la vallée, d’où leur avance. Je fais des petites courses à l’épicerie avant d’aller dans un des gites où je lis à l’abri alors qu’un orage éclate. C’est bien aussi.
Le propriétaire est un corse, un vrai, bougon et ronchon. Il nous raconte le mélodrame entre lui et le voisin-concurrent-voleur (qui tient l’épicerie mais qu’il ne déclarerait pas, la faisait passer dans les factures de son restaurant). Bref… 😐
Les autres randonneurs me proposent de manger avec eux au resto. Je paie par carte, ils me remboursent en espèce, et voilà mon problème de liquidité réglé.