CDT 13 : Silverthorne – Grand Lake

188mi/205km, 6 jours

Après une bonne journée de repos (qui finalement fut bien chargée : on est allé au restaurant à au moins 500m !), il est temps de repartir. Nous disons au revoir à tout le monde et partons seuls en bus en direction de Breckenridge. En effet, ici il y a une variante plus courte et plus facile qui a été plébiscitée par les autres ; c’est un peu dommage, car le parcours officiel est vraiment beau, même si assez fatigant. Mais nous savons qu’Icepus repart aujourd’hui un peu avant nous, donc nous espérons les retrouver.

La section suivante se fait beaucoup sur les crêtes. Au delà du manque d’eau, il faut bien gérer ses journées pour ne pas avoir à dormir là-haut : le Colorado est connu pour sa météo changeante et dangereuse. Aujourd’hui nous devons donc faire 32km pour dormir au pied des crêtes. Les jours suivants, nous devrons aussi faire environ la même distance, ce qui nous embête un peu vu que ça représente une baisse importante de notre moyenne journalière. Mais bon, la section étant réputée difficile, nous prendrons notre temps pour changer.

La première journée est sans histoire et sans grand chose à voir. Arrivé à l’endroit où nous voulons poser le camp, nous retrouvons Icepus qui sont déjà en train de rechercher le meilleur spot. D’après les cartes c’était plutôt plat, mais la réalité du terrain est tout autre et nous devons nous écarter les uns des autres. Nous mangeons ensemble, puis je me balade autour du camp pour saisir les belles couleurs du couchant.

Bien que nous ayons prévu de faire une courte journée (encore 32km), nous partons tôt pour éviter les potentiels orages de l’après-midi. Nous finissons de monter sur la crête puis nous suivons d’anciennes pistes minières. Les vestiges des activités passés sont encore bien présents sur les flancs des montagnes. Aux alentours de la mi-journée, nous ne retrouvons devant une grosse montée pour rejoindre des crêtes plus haut. Nous pouvons contourner cette portion en suivant les vallée, et Icepus décident de faire ça à cause du gros nuage noir qui se forme pas loin de nous. Anchor et moi décidons de continuer sur la crête, en pariant sur le fait que le nuage ne bougera pas. Pari gagné : l’orage se déchaine à une ou deux vallées de nous et nous laisse tranquille. La redescente de la crête est en hors-sentier dans une pente très raide barrée par une corniche de neige. Nous pouvons la passer relativement facilement, mais ensuite c’est un mélange de descente avec les mains et de traversée de névé. J’ai un peu l’habitude de faire ça (merci les Alpes) donc je m’engage, mais Anchor décide de rebrousser chemin et de contourner le passage en passant par le haut de la montagne. Nous nous retrouvons au niveau des ruines des mines quelques 200m plus bas. Nous finissons de descendre dans la vallée, puis nous la remontons pour dormir à la limite des arbres.

Encore une fois, il fut difficile de trouver de bons spots, surtout qu’Icepus sont arrivés avant nous et on pris le meilleur emplacement. Mais nous trouvons de quoi faire (je dors à la belle étoile, donc je n’ai pas besoin de grand chose. Mais s’il pleut cette nuit, je suis dans la mouise) et nous passons la soirée ensemble. Malgré les très longues pauses que nous avons prises, nous sommes installés avant 18h, donc nous avons pas mal de temps à perdre.

Si nous nous sommes arrêtés là, c’est qu’ensuite le chemin monte franchement jusqu’à une crête, que nous suivons de bon matin pour rejoindre le Mont Edwards (4 223m). Je vois ma première chèvre de montagne, qui étonnamment charge Icepus qui étaient devant nous (Iceman craint vraiment les orages, donc le matin ils partent plus tôt que nous). Ensuite la crête s’effile et devient ludique jusqu’à ce qu’on rejoigne la pente de Grays Peak (4352m et point culminant du CDT officiel). Nous passons un peu de temps au sommet avant d’enchainer avec le Torreys Peak (4 349m), son voisin. Il n’est pas sur le CDT, mais il est si proche que ce serait dommage de l’oublier, d’autant que la météo semble rester au beau fixe (encore une fois, j’ai eu une chance inouïe de ce point de vue là). Du coup c’est fini pour les 4000 du CDT (ou variantes) : j’en ai fait 5, dont 3 aujourd’hui.

La descente dans la vallée est longue. En bas, nous retrouvons un interstate (autoroute) que nous suivons. Heureusement, nous sommes de l’autre côté d’un torrent, et même si nous devons faire plusieurs kilomètres sur une piste cyclable goudronnée, ça aurait pu être pire. Enfin nous passons sous la route et retrouvons un sentier. Comme les jours précédents, nous montons le plus possible avant de nous arrêter à la limite des arbres. Pour une fois nous sommes au camp avant Icepus donc nous pouvons choisir les meilleurs emplacements. Alors que nous sommes en train de manger, Walkie-Talkie arrive. C’est la première fois que je le rencontre, et on le croisera plusieurs fois les jours suivants. Peu après débarque Snakefarm, qui a commencé le même jour qu’Anchor et qui faisait partie du même groupe qu’elle.

Le lendemain nous partons tous plus ou moins ensemble, mais certains vont s’arrêter aujourd’hui pour aller en ville. Anchor et moi n’en avons pas besoin donc nous marchons un peu plus vite afin d’avancer un peu, surtout que des orages sont prévus (comme toujours, mais pour le moment on n’en a jamais eu). Nous aimerions avancer le plus possible, car nous voulons arriver samedi matin à Grand Lake : le week-end un restaurant propose un buffet à volonté pour le petit-déjeuner, et il est assez célèbre chez les thru-hikers. Mais avant ça nous devons progresser sur la crête qui, si elle n’est pas difficile, est extrêmement venteuse. Après de longues heures à lutter contre le vent, nous redescendons enfin vers un col routier. Nous y retrouvons Hopefull (que j’avais croisé à Lordsburg puis avant Lake City) qui sirote tranquillement une bière en mangeant des cerises. Magie ? Non, trail magic. Un ancien randonneur est venu avec sa voiture proposer des mets de luxe. Voilà comment perdre 45 minutes sur une journée chargée…

Nous repartons enfin de ce traquenard en compagnie de Walkie-Talkie. En effet, il nous a entendu parler d’une variante plus courte que le CDT officiel, mais plus alpine et probablement plus dure, donc il veut la faire avec nous pour gagner du temps. Durant la montée l’orage menace franchement et nous recevons quelques gouttes, donc nous ne savons pas quoi faire. Le CDT redescend dans la vallée pour remonter en face ; la variante reste sur les crêtes (mais est loin d’être plate). Finalement, après 15 minutes de pause, nous estimons que les nuages sont en train de partir et nous nous lançons sur la variante. Très bon choix, ce passage est fantastique. Nous terminons en utilisant les mains pour passer une crête effilée avant d’escalader un éboulis de gros blocs de calcaire, c’est vraiment sympa. Cependant, il est tard, le soleil se couche et je suis extrêmement fatigué. Nous franchissons un dernier sommet – où nous retrouvons le CDT – avant de redescendre le long d’une crête. Le soleil est maintenant couché, et nous n’attendons que de trouver un emplacement à peu près plat pour nous arrêter. Finalement nous trouvons quelque chose, et à peine mon matelas gonflé je m’effondre dessus. Cette journée de 43km fut l’une des plus longue et fatigante de mon CDT.

Je me réveille au soleil levant avec une superbe vue et un ciel limpide. Nous partons assez tôt avec l’envie de faire le plus de kilomètres possible pour nous rapprocher de Grand Lake. Aujourd’hui est notre dernière journée sur les hautes altitudes du Colorado (nous remonterons aussi haut, mais ce ne sera que pour quelques sommets, pas sur de longues crêtes comme maintenant). Cependant, le ciel se couvre rapidement et à 9h un orage éclate. Vent, pluie, grêle, neige et éclairs se disputent les cieux. Ça ne dure qu’une trentaine de minutes, mais c’est assez pour que je réalise quelle chance j’ai eu avec la météo cette année. Habituellement, ils ont ça tous les après-midi dans le Colorado… Mais comme nous sommes tôt dans la saison (merci le manque de neige), nous avons passé les secteurs « à risque » avant l’arrivée de la mousson. Je marche lentement le matin car j’ai du mal à m’habituer à mes nouvelles chaussures (Altra Lone Peak 3.5). Plus particulièrement, le 0 drop me détruit les tendons d’Achille et je souffre le martyr la première heure de marche et après les pauses un peu longues.

Je me suis retrouvé séparé d’Anchor et Walkie-Talkie (j’étais juste derrière eux, mais je me suis abrité derrière un buisson avant que mes mains ne tombent de froid). Quand je les retrouve, ils me disent qu’ils ont croisé Lone Star, le texan avec qui j’ai commencé. Je suis déçu de ne pas l’avoir revu, mais ils me disent qu’il est redescendu vers les arbres. Nous terminons de suivre la crête avant de redescendre longuement. La suite de la journée est assez basique : nous longeons des lacs, d’abord sur un sentier, puis sur des pistes, puis de nouveau sur un sentier avec pas mal d’arbres en travers. Finalement nous arrivons à la limite du parc des Rocheuses, dans lequel il est interdit de bivouaquer sans permis. Il est environ 21h, nous avons fait 53km et il ne reste que 13km avant Grand Lake : objectif atteint. Nous posons le camp au bord du lac, à quelques mètres du panneau indiquant l’entrée dans le parc. Anchor est encore une fois arrivée avant nous et est déjà en tarin de finir de monter sa tente.

Au petit matin Walkie-Talkie est déjà parti : il aime arriver très tôt en ville pour en profiter le maximum. Anchor et moi suivons ses traces et nous arrivons en ville vers 9h. Nous nous précipitons au Fat Cat Cafe, mais déception : le buffet est bien là, il a l’air fantastique… Mais il y a la queue sur le trottoir. C’est qu’on a faim nous ! En regardant à l’intérieur, nous voyons Walkie-Talkie seul à une table. Nous le rejoignons donc, sous le regard amusé des gens qui avaient perçu notre détresse.

Nous quittons le buffet environ 2h plus tard. Dommage, je n’ai pas de photo, mais j’étais trop occupé. Nous rejoignons ensuite le Shadow Cliff Hostel, l’auberge la plus belle que j’aie pu voir. Il est encore tôt donc nous prenons notre temps pour les corvées (malheureusement ils n’avaient pas de machine à laver pour les clients, nous avons dû marcher jusqu’au Lavomatic et c’était super loin, au moins 1 ou 2km !).

Je profite du passage en ville pour aller dans un magasin de sport acheter une paire de semelle. La nouvelle paire ajoute un léger drop, donc j’espère que ça suffira pour calmer mes douleurs aux tendons d’Achille (oui, ça ira largement mieux d’ici quelques jours – ouf !).

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17-06-2018
Voilà à quoi ressemble une chambre d’hôtel sur le CDT un jour de mauvais teps (et avec la coupe du monde de foot à la télé) – Photo prise par Anchor

18-06-2018
C’est beau hein ?

Vu de plus proche

Derniers embrasements

Encore quelques couleurs

Un peintre est passé par là

19-06-2018
Petit bout d’ancienne piste minière – Photo prise par Anchor

Retour sur les crêtes

Bref passage sur d’anciennes pistes minières

Moi, Cattywampus et Iceman – Photo prise par Anchor

Vestiges de mines

Icepus (Iceman & Cattywampus)

Large vallée… Tentante, mais on reste en haut

Pétera, pétera pas ?

Le chemin parcouru

On continue sur les crêtes

Passage délicat

Anciennes mines

Les castors bossent bien

20-06-2018
Une véritable patinoire (mais la flemme de la contourner) – Photo prise par Anchor

Ma première chèvre de montagne !

En route vers Grays Peak

Sur la crête en direction de Grays Peak (en face à gauche ; à droite Torreys Peak) – Photo prise par Anchor

Ah oui c’est raide (et on est à ~4400m)

Chèvres de montagne (et paysage)

Youhou ! (Grays Peak, point culminant officiel du CDT à 4350m)

Paysage

21-06-2018
Sur la crête ventée

Symétrie

Bon chemin de crête – Photo prise par Anchor

Sur la crête entre les monts Flora et James, en espérant que ça ne tourne pas à l’orage

Petit passage alpin (variante)

Le CDT manque un peu de passages comme ça

Coup de projecteur sur la vallée

22-06-2018
Vue du matin, pas de chagrin

L’orage arrive – Photo prise par Anchor

Orage en formation de bon matin

Pendant ce temps, nous on manque d’eau

Après l’orage

Au bord du lac

Le chemin parcouru

23-06-2018
Une photo sans bouger de mon couchage

Douceur et pélican

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